Studiolo 1-2002, Anne-Lise DESMAS, Pierre de L'Estache (1688 ca. - 1774)

catalogue

chronologie

annexes

fortune critique

abréviations

bibliographie


5

Silène avec Bacchus enfant

1723-1725

copie de statue antique

marbre ; [H : 2 m]

Dresde, palais du Grand Jardin, salon du rez-de-chaussée.

6

Empereur Commode en Hercule

1723-1725

copie de statue antique

marbre ; [H : 2 m]

Dresde, palais du Grand Jardin, salon du rez-de-chaussée.

 

œuvres en rapport :

Silène avec Bacchus enfant

copie romaine d'un original en bronze de la fin du IVe siècle av. J.-C. par Lysippe ou un de ses successeurs

statue

marbre ; H : 2,12 m

Paris, musée du Louvre.

Empereur Commode en Hercule

copie romaine d'un type d'Héraklès dérivé d'un original du IVe siècle av. J.-C.

statue

marbre ; H : 1,90 m

Rome, musées du Vatican.

            Les deux statues furent commandées à Pierre de L'Estache en 1721 en même temps que la Vénus Callipyge [cat. 3] et le Mercure [cat. 4] par Thioly, envoyé à Rome du roi de Pologne, Auguste le Fort. Le directeur de l'Académie de France Poerson, contacté par Thioly, avait en effet proposé, dans un mémoire destiné au roi, le Silène avec Bacchus enfant (« le Grand Faune ») et le Commode en Hercule (« l'Empereur Commode ») comme deux des statues les plus importantes à faire copier [annexe V/A, lettre du 12 juillet 1721] : L'Empereur Commode faisait partie depuis le XVIe siècle des célèbres antiques qui ornaient la cour du Belvédère, alors que le Silène, tout aussi fameux, appartenait depuis le XVIIe siècle à la famille Borghèse et était exposé, dans la villa romaine, au centre d'une pièce qui portait son nom. Ces statues avaient notamment été moulées pour Charles Ier et Philippe IV et des copies en marbre et en bronze avaient été réalisées pour Louis XIV (Haskell, Penny, 1984, cat. 25, 78). L'Académie de France à Rome comptait bien sûr dans ses collections des moulages en plâtre de ces statues d'après lesquels Pierre de L'Estache allaient pouvoir travailler (C.D., I, p. 130, III, p. 357, VI, p. 442, VII, p. 333).

            Lors de la commande, Pierre de L'Estache avait prévu dix-huit mois pour la réalisation des œuvres dont il avait fixé le prix à mille écus romains, marbre non compris [annexe V/A, réponse au questionnaire du roi envoyée le 13 septembre 1721, « Ad. 2 »]. Le sculpteur commença probablement la copie des deux statues à l'automne 1723 après avoir terminé la Vénus et le Mercure. Une lettre de Poerson à d'Antin du 3 mai 1725 permet de préciser qu'à cette date le Silène et l'Empereur Commode étaient terminés (C.D., VII, p. 154). L'année suivante, les deux marbres étaient déjà à Dresde : décrits dans les inventaires des collections royales de 1726 et 1728, ils se trouvaient alors dans le jardin du palais Hollandais (Heres, 1986, p. 130). Après les désastres de la Guerre de Sept ans, le décor des parcs de Dresde fut remanié et dans l'inventaire de 1765 les statues sont dites installées dans le Grosser Garten mais sans que ne soit précisé leur emplacement exact (Heres, 1986, p. 130). En 1828, les deux statues furent disposées en pendant au pied de l'escalier du palais qui se trouve au centre de ce grand parc (Heres, 1990, p. 149). Les bombardements anglais et américains de février 1945 détruisirent presque tout le centre de Dresde, le palais du Grosser Garten fut alors fortement touché. Des photographies de 1946 montrent les deux statues très mutilées (Heres, 1986, fig. 2-3, p. 132-133) par rapport à un état de conservation qui semble satisfaisant sur des clichés de 1937. Les œuvres, transportées après la guerre dans un dépôt municipal, furent très restaurées. Les deux mains, la partie inférieure des jambes et le sexe du Silène sont des ajouts ainsi que la tête, les avant-bras et les jambes du petit Bacchus. L'avant-bras droit et la massue, la main gauche, les pieds et le sexe de Commode sont des ajouts, de même la tête, les deux mains, les pieds et le sexe de l'enfant qu'il porte ; la peau de lion et le rocher ont été retouchés en maints endroits. Les deux grands marbres sont actuellement, avec plusieurs statues du jardin, entreposés dans le salon du rez-de-chaussée du palais qui est en complète restauration.

            Dans les inventaires de 1726 et 1728 (Heres, 1986, p. 130), les deux statues avaient été inscrites sous le nom du sculpteur Paul Heermann (né près de Fribourg en 1673 et mort à Dresde en 1732). Cette attribution fut traditionnellement reprise par Kurt Degen en 1936, par Sigfried Asche en 1961 et 1966 et par Fritz Löffler en 1982. Dans sa monographie de 1961 sur les Permoser, Sigfried Asche posa toutefois le problème de la datation de ces œuvres par rapport à la chronologie des travaux de Paul Heermann : ce sculpteur qui fut constamment occupé à partir de 1715 aux travaux pour le Zwinger et dont la présence à Dresde est régulièrement documentée après cette date, n'avait pu réaliser les deux statues qu'entre 1710 et 1715 lors d'un voyage à Rome qui aurait été effectué, non dans le cadre de ses études, mais sur ordre du roi de Pologne. Gerald Heres étudia, dans un article paru en 1986, des documents qu'il retrouva aux archives nationales de Dresde concernant l'achat de copies de statues antiques à Rome en 1721. Si, grâce aux lettres écrites par Thioly depuis Rome au comte de Wackerbarth à Dresde, il put remettre en cause l'attribution des statues à Paul Heermann, il écrivait cependant qu'aucun sculpteur du nom de L'Estache ne figurait dans les dictionnaires (« Ein Bildhauer mit dem Namen ‘de L'Estache’ ist in den Lexika und Biographen nicht verzeichnet », p. 134). Grâce au professeur Jörg Garms, le même auteur corrigea en 1990 son erreur dans un second article qui retrace notamment l'historique des deux autres copies de statues antiques faites par Pierre de L'Estache pour Auguste le Fort [cat. 3-4].

bibliographie :

Lami, 1911, II, p. 77.

Degen, 1936, p. 65-66.

Asche, 1961, n° 14 p. 173, fig. 109, 131-132.

Asche, 1966, p. 112-114, cat. 12 p. 308-309.

Enggass, 1976, I, p. 213.

Löffler, 1982, p. .

Heres, 1986, p. 130-135, fig. 1-3.

Heres, 1990, p. 149.

Heres, 1991, p. 78, p. 78.

sources :

1721-1722, correspondance du comte de Wackerbarth à Dresde avec l'envoyé Thioly à Rome [annexe V/A].

1725, 3 mai, lettre de Poerson à d’Antin (C.D., VII, p. 154).