Studiolo 1-2002, Anne-Lise DESMAS, Pierre de L'Estache (1688 ca. - 1774)

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fortune critique

abréviations

bibliographie


2a

Méléagre

1718-1719

statuette

terre

2b

Méléagre

1719

statuette

marbre

perdue

perdue

            « Le Sr L'Estache, Sculpteur, a fait un modèle de terre d'invention après en avoir fait plusieurs d'après l'Antique, lequel représente Méléagre, et a acheté un petit bloc de marbre pour exécuter ce modèle, lequel il a desjà avancé. J'espère qu'il luy réussira avantageusement y prenant beaucoup de soin ». Cette lettre de Poerson à d'Antin du 28 février 1719 (C.D., V, p. 208) est la première et dernière à mentionner une œuvre en marbre exécutée par L'Estache lors de son séjour en tant qu'élève à l'Académie de Rome de 1715 à 1721. Il devait s'agir d'une œuvre de petites dimensions (« petit bloc de marbre ») grâce à laquelle le sculpteur comptait, après avoir parfait un modèle de terre, s'exercer à l'art de la taille. Précision très importante de Poerson, le modèle n'était pas une copie du célèbre Méléagre Pighini (Haskell, Penny, 1984, cat. 60) mais un morceau « d'invention ». Poerson ne reparla plus ensuite à d'Antin de l'œuvre ; on ignore donc si le scupteur termina la taille du marbre et de plus aucune statuette de Méléagre n'est citée dans la liste des œuvres envoyées en France en 1730 (C.D., VIII, p. 154) ni dans la description de l'Académie de 1727 (C.D., VII, p. 333-337). Il semble de toute façon exclu que ce Méléagre, de dimensions réduites et non copié d'après l'Antique, fût le morceau de marbre que les sculpteurs devaient traditionnellement envoyer à Versailles au cours de leur séjour romain.

            La représentation en sculpture de Méléagre est particulièrement appropriée pour permettre à un jeune sculpteur de s'exercer à toutes les techniques de travail du marbre puisqu'elle présente des difficultés très diversifiées : rendu de l'anatomie d’un corps musclé, expression du visage du jeune homme partant à la chasse ou au contraire agonisant après avoir été mortellement blessé, précision des accessoires du chasseur, naturalisme de la tête de sanglier traditionnellement représentée à ses côtés. Le thème de la mort de Méléagre avait ainsi été donné au sculpteur René Charpentier (1680-1723) comme morceau de réception à l’Académie de peinture et de sculpture ; Pierre de L'Estache, élève à l'Académie de 1712 à 1715, avait pu voir ce marbre achevé en 1713 (Souchal, I, 1977, cat. 9) et exposé dans les salles de cours (Guérin, 1715, p. 62-63). Un autre sculpteur, Simon Boizot, allait, dans l’histoire de l’Académie sous l’Ancien Régime, devoir représenter Méléagre pour son morceau d’agrément (1771) puis de réception (1778) : le jeune homme n’est plus figuré au moment de son agonie mais partant à la chasse d’un pas décidé. (Les œuvres de Charpentier et Boizot sont conservées au musée du Louvre, voir Gaborit et alii, 1998, II, p. 103, 136).

            Le thème de Méléagre n’était toutefois pas réservé aux exercices académiques comme en témoigne une statuette en marbre de Méléagre agonisant de la collection David Daniels à Minnéapolis (Sculpture from the David Daniels Collection, 1979, cat. 23), attribuée par Rudolf Wittower à Giuseppe Mazzuoli (1644-1725), sculpteur dont les marbres de petites dimensions étaient particulièrement appréciés. Il n’est ainsi pas à exclure que la statuette de L’Estache, dont le marbre avait, comme le dit Poerson, été acheté par le sculpteur lui-même, était destinée à une commande privée.

bibliographie :

Lami, 1911, II, p. 77.

Enggass, 1976, I, p. 212.

source :

1719, 28 février, lettre de Poerson à d'Antin (C.D., V, p. 208).